Oui, on parle du beau. Et c’est justement pour ça qu’on refuse de se taire!
- Valorisons ma Profession
- 16 avr.
- 3 min de lecture

Il y en a, dans le réseau, qui aimeraient qu’on cesse de nommer les choses. Qui nous demandent de parler du positif, de valoriser la profession en mettant l’accent sur ce qui va bien.
Mais ce "positif", ce "beau", nous le portons chaque jour dans nos gestes et dans nos prises de parole. Il a un nom : la qualité éducative.
Ce n’est pas une idée floue. C’est ce qui se joue dans les interactions sensibles, bienveillantes et intentionnelles entre la personne éducatrice et l’enfant. Un lien sécurisant. Un climat de groupe harmonieux. Une co-construction du développement global de l’enfant.
Ce travail est profondément professionnel. Il s’appuie sur une formation de haut niveau, une expertise, une compréhension fine du développement de l’enfant. Et pourtant, il est encore traité comme s’il ne valait pas plus qu’un bon cœur.
Ce que nous vivons, ce n’est pas digne d'un réseau soutenu. C’est un système sous pression, dans lequel le gouvernement se désengage. Il nous impose des exigences croissantes, tout en réduisant son soutien. Et pire encore : il punit au lieu de soutenir. Les obligations s’accumulent. Les ressources n’arrivent pas.
Et quand on ose parler? Le gouvernement n’aime pas qu’on parle. Il dit que ça nuit à ses efforts de recrutement.
Mais ce qui nuit vraiment au recrutement, c’est la réalité elle-même. Des conditions intenables. Une surcharge chronique. Une profession dévalorisée, malgré son importance.
La ministre de la Famille, Mme Suzanne Roy, a déclaré :
« Ce qui est gênant, c'est de ne pas reconnaître que les personnes [non-formées] qui entrent dans les services de garde éducatifs à l'enfance, ce sont des personnes dévouées, passionnées et compétentes. Et d'insinuer le contraire, c'est justement de dévaloriser la profession. »
Mais ce qui est réellement gênant, c’est de croire que cela suffit. De laisser entendre que la passion remplace la formation. Que l’amour des enfants remplace des conditions dignes. C’est là qu’on dévalorise la profession. Quand on réduit notre profession à une disposition affective, au lieu de reconnaître la compétence professionnelle et éducative qu’il exige.
Parler du beau? On le fait. Chaque fois qu’on parle des effets réels et puissants de la qualité éducative sur le développement des enfants. C’est ça, le vrai beau. Ce qui change des vies. Ce qui crée de l’égalité. Ce qui construit l’avenir.
Et oui, la valorisation de notre profession est indissociable de cette qualité éducative - comme l’a très bien dit Nathalie Bigras lors de son Facebook Live d’octobre 2024.
Mais nous demander de parler seulement du beau, c’est vouloir qu’on se taise. C’est entretenir une forme d’exploitation tranquille. Une exploitation qui s’appuie sur notre silence, notre dévouement… et sur le confort de ceux qui refusent de voir.
Alors oui, nous allons continuer de parler. Parce que dénoncer, ce n’est pas salir. C’est protéger ce qu’il y a de plus précieux : le droit des tout-petits de recevoir, chaque jour, de la qualité éducative. C’est refuser d’être complices d’un système qui ne tient plus que par l’abnégation* des femmes qui le portent.
Parce qu’une profession aussi essentielle mérite mieux qu’un discours. Elle mérite du respect, des ressources et un VRAI engagement de l’État.
*Selon le dictionnaire Le Petit Larousse, le mot abnégation est défini comme :« Le sacrifice volontaire de soi-même, de son intérêt, au bénéfice des autres. »
Autrement dit, il s’agit de se dévouer pleinement aux autres, en mettant de côté ses propres besoins, désirs ou intérêts personnels, souvent sans attendre de reconnaissance ni de retour.
Comentários